Illustrations : Helena Alcala
Alors que se multiplient les crises politiques mondiales et les récits catastrophistes sur la question environnementale, comment continuer à sensibiliser un public épuisé ? Une réponse serait peut-être à chercher du côté de l’humour. C’est ce que semble montrer « Plastic Attack », une vidéo de sensibilisation créative et décalée de Greenpeace France. Explorons cette problématique à travers les yeux de Jean-John, un jeune homme de notre temps.

Slide 1Jean-John, c’est lui
* 27 ans
* Célibataire
* Occupe un emploi en logistique qui le fatigue
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* 27 ans
* Célibataire
* Occupe un emploi en logistique qui le fatigue


Plastic Attack : la vidéo innovante de Greenpeace France

Eh oui !
Dans le cadre de sa campagne « Changeons le scénario », diffusée en 2024, Greenpeace France a émis le clip de sensibilisation Plastic Attack, alertant sur les dangers de la pollution plastique.
Bien que cette thématique s’inscrive dans la ligne éditoriale de Greenpeace, la forme du message se distingue de ses productions habituelles, au ton informatif (série Greenwatching) ou alarmiste (série Le monde brûle).
En effet, en collaborant avec le réalisateur Alexandre Courtès (Les Infidèles), Greenpeace a conçu son clip de sensibilisation comme un film d’horreur, jouant ainsi sur le ton de l’humour absurde.
Un changement de ton qui porte ses fruits ?
Apparemment, oui. En examinant les vues réalisées sur l’ensemble des vidéos publiées sur la chaîne YouTube de Greenpeace France, durant l’année 2024, Plastic Attack cumule 361’000 vues en mai 2025.
Il s’agit même de la 3ème vidéo la plus visionnée de la chaîne, ayant réalisé presque autant de vues en 1 an que les clips les plus populaires en près de 10 ans.

Vidéos de Greenpeace France publiées sur YouTube en 2024
Sur Instagram, la vidéo a aussi rencontré un certain succès, dépassant en nombre de « j’aime », de commentaires et de partages les 10 publications précédentes. Elle est, de plus, le 4ème (sur 50 !) reel le plus visionné de 2024 (avec 216 k vues).
Voir cette publication sur InstagramUne publication partagée par Greenpeace France (@greenpeace_france)
Pourquoi ça fonctionne
En dissimulant d’abord son objectif et son émetteur (le logo Greenpeace n’apparaît que plusieurs secondes après le début de la vidéo), l’annonce parvient à intriguer et à charmer par sa forme légère :
Un nanar aux couleurs vives, sur fond de vacances, qui met en scène des ennemis en plastique ridicules.
L’absurdité de ce scénario prête à sourire et spectateurs et spectatrices l’interpréteront probablement comme une situation fictive improbable qui ne les concerne pas.
Mais la seconde partie de la vidéo marque une véritable transition : les images colorées laissent place à un texte blanc sur fond noir et la musique se fait oppressante.
Le message « Ce scénario est absurde ? La réalité est pire » pousse à une autre interprétation : le plastique, loin d’être inoffensif, se révèle encore plus dangereux que ce qui nous a été montré dans la séquence nanar. En réalité, nous ne pouvons échapper aux microplastiques, qui se glissent dans notre alimentation. L’attaque du plastique est donc bien en cours et l’injonction « Changeons le scénario » encourage spectateur et spectatrice à lutter contre une situation qui les touche directement.
C’est pourquoi, ce passage inattendu de l’absurde au tragique rend le message de Greenpeace encore plus mémorable. Selon une étude en sciences cognitives, la surprise et l’explication que notre cerveau génère automatiquement pour la combler rendraient même l’information choc encore plus inoubliable !
La communication est alors transmise de façon originale, mais efficace, sans accabler ni choquer l’audience par la violence des images.
Communiquer en temps de crise : l’humour comme outil de choix
A l’heure où la majorité des contenus sensibilisant aux thématiques environnementales privilégient un ton alarmiste, les professionnels et professionnelles de la CIG doivent réfléchir à s’adapter à un contexte de crises multiples et à un public épuisé émotionnellement.
Il ne s’agit pas de transiger sur les enjeux, suffisamment graves par nature, mais plutôt d’établir une proximité affective avec le public à travers la façon de les communiquer. L’humour sert alors de porte d’entrée émotionnelle efficace dans un climat saturé.
Si l’éco-anxiété, dans des limites raisonnables peut pousser à l’action, une personne exposée à de trop nombreux contenus catastrophistes risque aussi se laisser décourager, conclut une étude sur la question.
Alors soyons drôles, dans la mesure du possible, empathiques et surtout créatifs et créatives !

Bibliographie
- Foster, M. I., & Keane, M. T. (2019). The Role of Surprise in Learning: Different Surprising Outcomes Affect Memorability Differentially. Topics in cognitive science, 11(1), 75–87. https://doi.org/10.1111/tops.12392
- Newman, N., Fletcher, R., Robertson, C. T., Ross Arguedas, A., & Nielsen, R. K. (2024). Reuters Institute Digital News Report 2024. Reuters Institute for the Study of Journalism. https://reutersinstitute.politics.ox.ac.uk/sites/default/files/2024-06/RISJ_DNR_2024_Digital_v10%20lr.pdf
- Ogunbode, C. A., Doran, R., Hanss, D., Ojala, M., Salmela-Aro, K., van den Broek, K. L., Bhullar, N., Aquino, S. D., Marot, T., Schermer, J. A., Wlodarczyk, A., Lu, S., Jiang, F., Maran, D. A., Yadav, R., Ardi, R., Chegeni, R., Ghanbarian, E., Zand, S., … Karasu, M. (2022). Climate anxiety, wellbeing and pro-environmental action : Correlates of negative emotional responses to climate change in 32 countries. Journal of Environmental Psychology, 84, 101887. https://doi.org/10.1016/j.jenvp.2022.101887
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