On imagine à tort que la communication de crise est improvisée et menée dans la panique. Pourtant, derrière chaque prise de parole et chaque communiqué de presse se cachent des protocoles, des entraînements et surtout une stratégie maîtrisée. Les coulisses nous sont dévoilées par le porte-parole et spécialiste de la communication de la SUVA. Celui-ci nous présente, lors d’un entretien, 5 points essentiels à la sauvegarde de la confiance du public en cas de crise.
1. L’importance de l’image
Pour le professionnel de la communication interviewé, « si les entreprises aujourd’hui communiquent d’une manière générale, c’est pour donner une bonne image, pour justement que le public ait confiance. » L’image de l’institution doit être soignée en tout temps, et pas seulement lors d’une crise. En période d’incertitude, les clients, les citoyens ou encore les collaborateurs recherchent des repères fiables.
Ainsi, une image soignée en amont consolide la confiance, même en temps de crise. Le public sera moins enclin à croire des informations fausses ou accusatrices provenant d’autres acteurs. Pour cette raison, de plus en plus d’institutions ou de services publics se dotent d’une équipe de communication ou mettent en place une stratégie. En 2023, 63% des entreprises suisses se trouvaient sur les réseaux sociaux.
Le communicant interrogé insiste sur l’importance d’avoir une présence sur plusieurs canaux, dont les réseaux sociaux, mais prévient : « l’image descend très vite et remonte très très lentement », ainsi, il faut faire attention aux faux pas d’autant plus que pour lui les réseaux sociaux sont « des accélérateurs de tout. »
2. Simuler pour mieux gérer
Dans la plupart des institutions d’intérêt général, des simulations de crise sont organisées plusieurs fois par an. Le communicant interrogé explique que, dans son institution, l’exercice est annoncé le jour même, sans que le type de crise ne soit précisé à l’avance. L’équipe doit alors activer un protocole bien défini, appelé « concept de crise », qui commence par l’ouverture immédiate d’une cellule de crise.
Ces simulations sont essentielles, non seulement pour entraîner les personnes concernées, mais aussi pour tester l’efficacité du dispositif et ajuster le plan d’action si nécessaire.
Les équipes de communication sont préalablement organisées par thématiques et par canaux, appelée « newsrooms », afin de gagner en réactivité et de mobiliser rapidement les bons spécialistes, capables de répondre efficacement, quel que soit le scénario.
3. Une surveillance à 360°
La surveillance et l’anticipation de potentielles crises est une grande part du travail du communicant interviewé. « On a d’une manière globale un suivi, ce qu’on appelle le issue management. Effectivement, on suit ce qui se passe sur les réseaux sociaux, on suit ce qui se passe dans les médias. »
Au quotidien, de nombreux outils sont déployés pour analyser tout ce qui circule au sujet de l’institution ou qui pourrait avoir un impact sur celle-ci. Ces informations sont partagées à l’ensemble des collaborateurs afin que tout le monde soit informé au même niveau. Il est également primordial, au-delà de cette veille, de connaître les sensibilités spécifiques du secteur dans lequel évolue l’institution.
Les communicants sont entraînés et anticipent toutes les « questions qui tuent » que pourraient leur poser les médias par exemple. Le communicant a évoqué en revanche le risque de cyberattaques accompagnées de demandes de rançon qui restent difficiles à prévoir et concernent un nombre croissant d’entreprises.
4. Tirer plus vite que son ombre
« Dire que la vérité, mais pas toute la vérité » c’est ce que conseille le communicant interviewé. Si cette formule semble controversée, le message principal qu’il faut retenir est que l’honnêteté et la proactivité sont vitales lors de la communication de crise et que le mensonge est dangereux, voire létal.
Pour l’entreprise, c’est essentiel pour apprendre, dire ce qui va changer, afin de montrer une volonté de faire mieux dans le cas où l’institution a commis une erreur.
L’institution peut aussi choisir de ne pas communiquer certaines informations, si celles-ci ne sont pas jugées utiles pour le public ou risquent de générer des inquiétudes non fondées. La rapidité de la communication est tout aussi importante : la première entité à communiquer prend souvent le contrôle du récit avant que spéculation, désinformation et rumeurs n’envahissent l’espace public.
À l’inverse, tout retard injustifié ou toute tentative de minimisation peut aggraver la crise et ternir durablement l’image de l’institution.
5. Soigner ses relations
La confiance est nécessaire non seulement entre l’institution et son public, mais aussi avec les autres institutions partenaires, les institutions « concurrentes » et les médias. Selon le communicant interrogé, ces relations doivent être entretenues avec soin, car elles peuvent se révéler précieuses en période de crise.
Ces partenariats, lorsqu’ils sont fondés sur la confiance et une connaissance mutuelle des rôles, facilitent les échanges d’informations critiques et renforcent la crédibilité de la communication publique. En somme, une crise bien gérée repose généralement sur des liens tissés bien avant son déclenchement.
La communication de crise, loin d’être improvisée ou guidée par la panique, repose sur des fondations solides : une image construite avec soin, des protocoles rodés, une veille constante, des réponses rapides et transparentes, ainsi que des relations stratégiques cultivées bien en amont.
Si vous ne voulez pas vous retrouver comme dans l’image principale en cas de crise, voici un petit vocabulaire des concepts importants en communication de crise :
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