Dans notre société actuelle, la problématique écologique, les enjeux du réchauffement climatique et la nécessité de s’en préoccuper commencent gentiment à fleurir dans la conscience de la plupart des marques et des entreprises. Depuis 2021, les arguments écologiques se répandent donc dans les campagnes de publicité. Cependant, au milieu de ce champ vert, un florilège de greenwashing pousse, telle une mauvaise herbe, parfois difficile à distinguer et, surtout, souvent involontaire. Comment faire pour éviter d’en être soi-même le jardinier dans sa communication ? Nous vous dévoilons les réponses obtenues dans le cadre d’une conférence organisée par Reboot!
De nos jours, l’intérêt et les préoccupations à propos de l’environnement grandissent chez les consommateurs. Parallèlement, l’utilisation par les entreprises d’arguments écologiques disproportionnés voire trompeurs et peu cohérents avec la réalité, devient de plus en plus fréquente. Jour après jour, la liste d’exemples de campagnes publicitaires utilisant le “greenwashing” s’allonge. Et, alors que l’objectif initial est de se donner une image plus vertueuse, ce genre de communication tend plutôt à faire baisser la confiance des consommateurs envers l’entreprise ou la marque et à dégrader sa réputation…
Mais que veut réellement dire « greenwashing » ou en français «l’éco-blanchiment »? Pour Céline Réveillac, auteure du compte Instagram @greenwashing_lovers, il s’agit d’« un message qui veut faire croire à des avantages écologiques ou durables supérieurs à ceux de la réalité ».
Cette consultante en communication et spécialiste en greenwashing a d’ailleurs profité de la deuxième édition de Reboot! pour nous informer sur le propos. Durant cet événement dédié à la communication responsable, du 14 au 18 novembre 2022, une conférence donnée par Céline Réveillac et en collaboration avec Mathieu Jahnich, consultant, chercheur et co-fondateur du Collectif des chercheurs-consultants, nous a permis d’en apprendre davantage sur l’éco-blanchiment et… apprendre à le débusquer! Nous vous partageons les conseils de ces deux expert·e·s.
En février 2022, un article, intitulé, « Le greenwashing : entre mensonges et vert-ités » était publié sur PointComm’ et vous expliquait ce qu’était le greenwashing et quelques méthodes pour ne plus se faire avoir. Dans cet article, nous vous donnons cinq précieux conseils pour éviter, en tant que (futur) communicant·e, de faire soi-même du greenwashing.
Car même avec les meilleures intentions du monde, on peut parfois facilement tomber dans le panneau du greenwashing. Alors pour éviter l’éco-blanchiment, il faut avant tout savoir le repérer et identifier les pratiques qui lui sont liées. Mathieu Jahnich, consultant-chercheur en marketing et communication, propose cinq signes courants à connaître, à déjouer et donc à s’abstenir de faire soi-même, en tant que communicant·e :
1. Identifier son message pour ne pas valoriser des comportements répréhensibles ou dénigrer des comportements écocitoyens
Pour donner une belle image de sa marque ou de son entreprise, nous aurions envie de montrer les avantages à l’utiliser. Cependant, il faut prendre soin de ne pas montrer des comportements non-écolos à ses fins ! Par exemple, une compagnie ferroviaire qui vante les mérites écologiques de prendre le train, c’est oui ! Un service de jets privés expliquant que nous pouvons voyager sans culpabilité car il existe une compensation CO2… c’est non !
2. Faire preuve d’honnêteté et éviter les propos exagérés
Attention aux propos mensongers ou disproportionnés par rapport à la réalité. Si votre entreprise propose des solutions écologiques, faites-le savoir. Mais soyez honnête et réaliste : évitons de dire qu’une nouvelle voiture va sauver la planète alors qu’elle n’a seulement qu’une consommation plus basse de carburant que ses concurrents… « Rouler vert » n’existe pas!
3. La transparence avant tout : éviter les allusions
Les informations proposées aux consommateur·trice·s doivent être claires ! Il ne faudrait pas les induire en erreur ou installer un flou dans leurs esprits. Le message doit être évident et compréhensible : on évitera donc de dire que des lunettes de vue sont « 100% bio » car personne ne sait véritablement ce que cela implique : qu’est-ce qui est bio ? La monture ? Les verres?
4. Utiliser des visuels ou sons suggestifs
Prenez garde : l’utilisation de certains pictogrammes aux connotations naturelles (des arbres, une planète, par exemple) est soumise à des restrictions. Vous pouvez donc tomber dans l’illégalité si vous utilisez des pictogrammes qui donnent la fausse impression que votre produit a un impact écologique positif. Par exemple, une marque qui représente un pot de yaourt en superhéros vêtu de vert, sauvant la planète grâce à son emballage en carton, peut-être considérée comme malhonnête, surtout, si le reste est en plastique non-recyclé, par exemple.
5. Faire campagne sur des enjeux secondaires
Encore une fois, tout est une question de transparence : on évite donc de faire du tapage écologique pour passer sous silence des enjeux plus importants. Quand nous représentons une grosse banque aux ambitions peu durables, il est peu cohérent de mettre en avant des cartes bancaires qui utilisent moins d’encre, alors que nous soutenons les combustibles fossiles. De même, promouvoir une action écologique qui relève de la loi serait considéré comme un manque d’honnêteté : en France, certaines marques de fast-food se vantent de ne plus utiliser de vaisselle jetable dans leurs restaurants, alors qu’en réalité, ils ont été contraints légalement de le faire en début d’année.
Comment signaler ces pratiques?
Maintenant que vous avez toutes les cartes en main pour éviter toute trace de greenwashing dans vos projets, vous allez peut-être développer une vigilance aiguisée et en déceler davantage autour de vous ! Mais que faire si vous souhaitez signaler ces pratiques peu honnêtes?
Voici quelques indices : les juristes de l’ARPP (Autorité de régulation professionnelle de la publicité) en France sont disposé·e·s à nous écouter et à recevoir nos remarques, nos doutes. L’ARPP tient également à former ses adhérent·e·s, à les suivre dans leurs différents projets afin de leur permettre de créer des campagnes de communication responsable loin de tout signe de greenwashing.
En Suisse, la Fédération Romande des Consommateurs (FRC) renseigne au travers de plusieurs articles des moyens de refuser et d’agir concrètement contre le greenwashing : « la personne qui donne des indications inexactes ou fallacieuses par le biais d’une publicité, d’un emballage ou de tout autre support peut être condamnée au titre de la Loi contre la concurrence déloyale (LCD). Il faut alors saisir la justice civile ou déposer une plainte pénale, les autorités ne procédant pas à un contrôle d’office » (Greenwashing – Fédération romande des consommateurs).
Même si nous n’avons pas d’organisme direct traitant des cas de greenwashing, la Commission Suisse pour la Loyauté nous aide à agir contre les cas que nous avons repérés.
Avec ces outils en main, complétés par les conseils que nous vous offrons plus haut dans cet article, vous, communicants d’aujourd’hui comme de demain, avez de quoi cultiver des projets verts sans fausse note !
Ce contenu a été réalisé pour le cours “Théories et missions de la Communication d’intérêt général”, dans le cadre du master en Création de contenus et communication d’intérêt général de l’Académie du journalisme et des médias (AJM) de l’Université de Neuchâtel.